Simultan

Quand Bielarium devient delirium

Aus Simultan

Version vom 9. Dezember 2007, 18:32 Uhr von JulienM (Diskussion | Beiträge)

Les Sly Cats dégainait leur premier morceau, la guitare partait en ligne droite, la contrebasse toum-toum, toum, toum, et la battrie pétrissait les cymbales et la caisse claire, Bourriez s'était réfugié au bar, pas dans son assiette, une bière à la main, la trouille dans les tripes, les notes lui faisaient des croches-pattes, il commençait à vaciller, ça lui tournait dans le tête.

- Vous aimez cette musique, Monsieur?

Bourriez ne comprenait pas qu'on lui parlait, il restait en lui-même, tournait les idées dans tous les sens, cherchait Nadine, elle ne venait pas, s'impatientait, délirait, le public applaudit le premier morceau, le groupe enchaîna illco presto, Bourriez chancela sous la première note, trébucha, genou sur le goudron, immobile à terre, il ne savait plus comment il s'appelait. Nothing rien qu'un trou dans l'esprit rien qu'un trou dans le ventre et du sang sur les mains nothing la chambre jaune conserve son mystère et son impasse rien tout est là disposé devant soi le grand rien nothing la vésicule d'un univers en poche sous les yeux nothing le trou noir le mouvement entropique rien nothing Rouletabille résoudra le mystère rien tour dans le ventre trou dans les yeux double trou dans la bouche noir noir noir rien nothing rien qu'un ébouli une chute au bout de pieds rien qu'une ligne horizontal nothing des mots creux les uns derrière les autres le son d'un accordéon rien des notes blanches des notes en négatif rien que l'espace comme l'idée de l'infini dans le fini nothing oh nothing un retrait à travers le quel rien ne passe rien tout dans le ventre tout dans le ventre rien tirs de mitraillettes du sang du sang des poches de sang autour du coup rien non rien rien rien tic rien tac rien tic rien tac nothing une pierre sur la joue rien l'enfoncement de la chair en elle-même rien revenant rien repliement saccage rien que le cri asphyxié rien une lance d'incendie dans les trous rien

rien

Rien, un spot se décrocha, signe de mauvais augure, vint s'écraser juste au pied du guitariste. La musique s'arrêta net, un rumeur dans la foule, qu'est-ce qui se passait, Bourriez ne revenait pas à lui, dans les limbes, la lampe à bras du dentiste l'éblouissait, on décida de faire une pause, le groupe sortit de scène, on remit mis en ordre, ce n'était rien, un accident, qui ne portait aucune conséqence sur la suite, le groupe revint, coup de guitare, freejazz à volonté, tandis qu'on s'occupait de rétablir cette vieille loque de Bourriez, Nadine, courant vers l'amas de chair, présentant un malheur, merde, merde, non, pris Bourriez dans les bras, tenta de la ranimer, la scène grinçait, Bourriez sonné ouvrit les yeux, et Nadine lâcha sous la pression:

- Bourriez, mon gros Bourriez, je t'aime, je ne te laisserai plus.

- Je veux partir, je veux que nous partions, tout de suite, pour le Canada, oh, Nadine, viens avec moi, la pêche, la chasse, une cabane, le grand air, viens Nadine, partons, prenons le premier vol.

- Oui, je veux.

Bourriez, dépresseurisé, tomba, béatement, dans le sommeil.