Simultan
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− | L’homme fixe le décor vide, au-dehors. Tout est immobile. Par la fenêtre, il voit le salon des voisins. Une tête de cerf empaillée, plutôt classique. Plutôt sympathique, genre SPA. Il adore ces fragments de vie inexpliqués. L’étrange. Un étang d’étrange. Une femme passe ; elle porte un tailleur gris, elle est absolument commune. Il la fixe avec une profonde et intense indifférence. Elle pourrait mourir ici, en cet instant, qu’il ne réagirait pas, qu’il ne ferait pas le moindre mouvement. Et pourtant, il ne peut la quitter des yeux. | + | L’homme fixe le décor vide, au-dehors. Tout est immobile. Par la fenêtre, il voit le salon des voisins. Une tête de cerf empaillée, plutôt classique. Plutôt sympathique, genre SPA. Il adore ces fragments de vie inexpliqués. L’étrange. Un étang d’étrange. Une femme passe ; elle porte un tailleur gris, elle est absolument commune. Il la fixe avec une profonde et intense indifférence. Elle pourrait mourir ici, en cet instant, qu’il ne réagirait pas, qu’il ne ferait pas le moindre mouvement. Et pourtant, il ne peut la quitter des yeux. |
− | Brusquement, elle s’arrête et lève les yeux vers lui. Il doit arrêter de boire son café et lâcher la tasse. Enfin, il devrait. Mais autant il aimait son salon, autant il la trouve fade. Avec moins d’habits, à la rigueur. L’homme tourne la tête, au prix d’un immense effort. Il fixe son appartement un peu vide, en chantier. Il n’y a rien ici qui lui appartienne vraiment, qu’il a vraiment choisi. Tout semble ici appartenir à un autre. D’ailleurs, il ne supporterait jamais d’être prof, faire des dessins à l’acrylique, des oiseaux en papier mâché : une perte d’énergie pour cette marmaille qui n’est pas la nôtre. Débarrassons-nous d’eux, ils ne servent à rien. Il faut savoir jeter, ne pas gaspiller, se libérer de l’inutile au quotidien. Faire le vide, faire le tri, mettre à la poubelle. D’ailleurs, il lui faut aller à la Migros pour déposer le verre vide. Il se lève, prend la bouteille de vin devant lui, et la vide dans l’évier avant de la placer soigneusement dans un sac en plastique, parmi ses semblables. Enfin, semblables… Il lui semble qu’elles se ressemblent toutes, de toute façon. Sans blague ! Il faudrait qu’il fasse un geste. | + | Brusquement, elle s’arrête et lève les yeux vers lui. Il doit arrêter de boire son café et lâcher la tasse. Enfin, il devrait. Mais autant il aimait son salon, autant il la trouve fade. Avec moins d’habits, à la rigueur. L’homme tourne la tête, au prix d’un immense effort. Il fixe son appartement un peu vide, en chantier. Il n’y a rien ici qui lui appartienne vraiment, qu’il a vraiment choisi. Tout semble ici appartenir à un autre. D’ailleurs, il ne supporterait jamais d’être prof, faire des dessins à l’acrylique, des oiseaux en papier mâché : une perte d’énergie pour cette marmaille qui n’est pas la nôtre. Débarrassons-nous d’eux, ils ne servent à rien. Il faut savoir jeter, ne pas gaspiller, se libérer de l’inutile au quotidien. Faire le vide, faire le tri, mettre à la poubelle. D’ailleurs, il lui faut aller à la Migros pour déposer le verre vide. Il se lève, prend la bouteille de vin devant lui, et la vide dans l’évier avant de la placer soigneusement dans un sac en plastique, parmi ses semblables. Enfin, semblables… Il lui semble qu’elles se ressemblent toutes, de toute façon. Sans blague ! Il faudrait qu’il fasse un geste. |
− | Il sort de chez lui. S’étire. C’est comme un réflexe. Il sent ses muscles rouler sous sa peau. C’est agréable de se sentir fort. Il froisse en sortant de la cour les fleurs de lavandes, porte les doigts à son nez. Lui qui n’aime aucun parfum, celui-la le fascine. Il sent le vrai. Ça semble ridicule à dire, et pourtant c’est ça. Il s’approche. La situation lui semble surréaliste. Peut-être qu’il devrait arrêter de fumer ces joints sur son balcon, arrêter de prendre des bains trop chaud ou de regarder le cul des filles quand elles passent. Un instant de malaise, puis il se sent basculer vers l’avant. Sa tête heurte les pavés, il perd connaissance. | + | Il sort de chez lui. S’étire. C’est comme un réflexe. Il sent ses muscles rouler sous sa peau. C’est agréable de se sentir fort. Il froisse en sortant de la cour les fleurs de lavandes, porte les doigts à son nez. Lui qui n’aime aucun parfum, celui-la le fascine. Il sent le vrai. Ça semble ridicule à dire, et pourtant c’est ça. Il s’approche. La situation lui semble surréaliste. Peut-être qu’il devrait arrêter de fumer ces joints sur son balcon, arrêter de prendre des bains trop chaud ou de regarder le cul des filles quand elles passent. Un instant de malaise, puis il se sent basculer vers l’avant. Sa tête heurte les pavés, il perd connaissance. |
− | [[Category:Jörg | + | [[Category:Jörg]] [[Category:Sven]] [[Category:Thomas|Exquis]] [[Category:Matheo]] |
Aktuelle Version vom 19. Januar 2011, 14:14 Uhr
L’homme fixe le décor vide, au-dehors. Tout est immobile. Par la fenêtre, il voit le salon des voisins. Une tête de cerf empaillée, plutôt classique. Plutôt sympathique, genre SPA. Il adore ces fragments de vie inexpliqués. L’étrange. Un étang d’étrange. Une femme passe ; elle porte un tailleur gris, elle est absolument commune. Il la fixe avec une profonde et intense indifférence. Elle pourrait mourir ici, en cet instant, qu’il ne réagirait pas, qu’il ne ferait pas le moindre mouvement. Et pourtant, il ne peut la quitter des yeux.
Brusquement, elle s’arrête et lève les yeux vers lui. Il doit arrêter de boire son café et lâcher la tasse. Enfin, il devrait. Mais autant il aimait son salon, autant il la trouve fade. Avec moins d’habits, à la rigueur. L’homme tourne la tête, au prix d’un immense effort. Il fixe son appartement un peu vide, en chantier. Il n’y a rien ici qui lui appartienne vraiment, qu’il a vraiment choisi. Tout semble ici appartenir à un autre. D’ailleurs, il ne supporterait jamais d’être prof, faire des dessins à l’acrylique, des oiseaux en papier mâché : une perte d’énergie pour cette marmaille qui n’est pas la nôtre. Débarrassons-nous d’eux, ils ne servent à rien. Il faut savoir jeter, ne pas gaspiller, se libérer de l’inutile au quotidien. Faire le vide, faire le tri, mettre à la poubelle. D’ailleurs, il lui faut aller à la Migros pour déposer le verre vide. Il se lève, prend la bouteille de vin devant lui, et la vide dans l’évier avant de la placer soigneusement dans un sac en plastique, parmi ses semblables. Enfin, semblables… Il lui semble qu’elles se ressemblent toutes, de toute façon. Sans blague ! Il faudrait qu’il fasse un geste.
Il sort de chez lui. S’étire. C’est comme un réflexe. Il sent ses muscles rouler sous sa peau. C’est agréable de se sentir fort. Il froisse en sortant de la cour les fleurs de lavandes, porte les doigts à son nez. Lui qui n’aime aucun parfum, celui-la le fascine. Il sent le vrai. Ça semble ridicule à dire, et pourtant c’est ça. Il s’approche. La situation lui semble surréaliste. Peut-être qu’il devrait arrêter de fumer ces joints sur son balcon, arrêter de prendre des bains trop chaud ou de regarder le cul des filles quand elles passent. Un instant de malaise, puis il se sent basculer vers l’avant. Sa tête heurte les pavés, il perd connaissance.