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Un coup de dés jamais n'abolira le hasard: Unterschied zwischen den Versionen

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<br>Il arriva au cabinet à huit heures, soit quinze minutes plus tôt que d’habitude, la mallette en main. Mme Hagebutten n’était pas encore là. Il entra dans son bureau, posa la mallette sur le sol et s’assit sur son fauteuil. <br>Aaron Schmitt avait prit la décision la plus simple, celle de remettre la mallette à [[Aaron Schmitt le fataliste|Vito Antonielli]] et d’en informer M. Poe. De ce fait, les choses rentraient dans l’ordre et il ne parlerait plus jamais de cette mallette.<br>Il faut dire que la nuit avait été agitée. Le vieux psychiatre n’avait pas fermé l’œil. Il n’avait cessé de se demander comment Vito Antonielli avait su pour la mallette. Il n’y avait qu’une seule explication possible. M. Poe s’était souvenu l’avoir oubliée dans le cabinet d’Aaron Schmitt et l’avait dit à Vito Antonielli. <br>Le vieux psychiatre avait reçu un mail d’Antonielli, convenant d’un lieu et d’une heure de rendez-vous. Il devait le retrouver à neuf heures trente précises au café de l’Odéon. Mais il devait voir une patiente avant. Aaron Schmitt espérait que la séance ne s’éterniserait pas. Heureusement, la patiente annula le rendez-vous et le vieux psychiatre eut un peu moins d’une heure pour tenter de se calmer. Alors qu’il réfléchissait, tout en buvant un verre de scotch, Mme Hagebutten entra dans le bureau&nbsp;:<br>- Docteur Schmitt, je vous dérange&nbsp;?<br>- Oui.<br>- C’est à propos de M. Poe, dit la réceptionniste presque en chuchotant, il est décédé hier soir.<br>Aaron Schmitt sentit son cœur faire un bond. Il se redressa sur sa chaise et faillit renverser son verre. <br>- Comment est-il mort&nbsp;? demanda-t-il.<br>- Renversé par un camion.<br>Le vieux psychologue se rassit et étrangement, se sentait rassuré. Tout de suite, il avait imaginé M. Poe assassiné par Antonielli. Pendant un instant, il se demanda si tout cela s’était vraiment passé.<br>Sa montre indiquait neuf heures et quart. Il était temps de se rendre à l’Odéon. Une atmosphère grise et pluvieuse flottait dans les rues. Certains passants portaient des bonnets et d’autres des gants. L’Odéon ne se trouvait pas très loin du cabinet, à cinq minutes à peine. Arrivé sur place, Aaron Schmitt commanda une pression et il attendit. <br>Il scrutait les passants à travers la vitre, tout en buvant nerveusement. A plusieurs reprises, un homme entra dans le café et passa devant lui, mais sans s’arrêter. Il finit sa bière et en commanda une autre. Il ne pensa pas une seule seconde à M. Poe. Seul comptait l’instant présent. Une heure passa mais Aaron Schmitt était toujours autant nerveux. Il se demanda à quoi bon le faire attendre dans le café. Du pied, il vérifia que la mallette était là, sous la table. Un homme entra et le regarda, mais ce fut bref, et l’homme continua son chemin pour aller s’asseoir à une table du fond. <br>Il était midi et le café commençait à se remplir de clients qui désiraient manger. Aaron Schmitt paya l’addition et retourna en direction de son cabinet. Son esprit était embrouillé. Pourquoi Antonielli n’était pas venu&nbsp;? Peut-être que celui-ci l’avait averti par mail. Aaron Schmitt sentait au fond de lui que quelque chose s’était passé. En arrivant au cabinet, la première chose qu’il fit fut de vérifier ses mails mais la boite était vide. Ensuite, il fouilla le bureau de Mme Hagebutten, celle-ci était partie manger, à la recherche d’une lettre ou d’un mot, de n’importe quoi. Il ne trouva rien. Alors, il décida de faire une pause et d’allumer un moment la télévision, celle qui se trouvait dans la salle d’attente. Il tomba sur le journal télévisé et à nouveau, son cœur fit un bond. <br>On y voyait Vito Antonielli embarqué dans une voiture de police. Apparemment, l’escroc s’était fait arrêter la veille. La présentatrice résumait en quelques mots l’arrestation et les chefs d’accusation. Voilà pourquoi Antonielli n’était pas venu à l’Odéon. <br>Aaron Schmitt éteignit le téléviseur. Etait-ce le fruit du hasard&nbsp;? D’abord, M. Poe qui décède et ensuite Antonielli derrière les barreaux. Et le même jours, qui plus est. <br>Tout en buvant son verre de scotch, le vieux psychologue réfléchissait. Avec Antonielli en prison, il ne risquait plus rien. Mais que faire de tout cet argent&nbsp;? La réponse était facile.<br>La nuit tombée, Aaron Schmitt se rendit au Lac de Bienne dont les reflets de lune éclaircissaient la nuit. Il resta un instant au bord de l’eau et observa les alentours. Personne à l’horizon. Alors, de toutes ces forces, il lança la mallette qui d’un bruit sourd, s’engouffra dans les profondeurs du lac. <br>Ensuite, il s’assit et s’alluma une cigarette. Il ne fumait plus depuis des années mais à ce moment, il avait besoin d’une cigarette. Puis, il se leva et rentra chez lui.<br>Il se mit au lit rassuré et heureux, se disant que parfois le hasard fait bien les choses. Il entendit un bruit provenant du couloir et se redressa dans son lit, à l’affût du moindre bruit. Il sortit gentiment du lit et dans l’obscurité la plus profonde, il se dirigea vers la porte d’entrée. Il lui semblait sentir la présence d’un homme dans le couloir. Il prit une bouffé d’air et d’un mouvement rapide, ouvrit la porte. Mais personne ne se trouvait derrière et le couloir était vide. Alors, il s’appuya contre le mur, s’alluma une cigarette et se demanda si tout cela s’était vraiment passé. Puis, il ressentit une grande douleur.
  
Coussin calé derrière la tête, seul désormais dans le lit matrimonial, Aaron Schmitt n’arrivait pas à trouver le sommeil. Tous les retournements stratégiques, contre la gauche, contre la droite, en face de la fenêtre, de la porte, afin de trouver la position idéale n’avait pas arrangé les choses. Aaron Schmitt avait maintenant mal au dos.<br>Il pensa à se lever et à se préparer une tasse de lait arrosé d’une goutte de miel. Si dans cinq minutes, il était encore en train de remuer comme un lion en cage, il n’essaierait plus de lutter. Cinq minutes plus tard, Aaron Schmitt se leva.<br>La chambre baignait dans une lumière blafarde. De minces filets de lune parvenaient à se faufiler à travers les volets qui étaient toujours fermés la nuit tombée, il était si facile pour un cambrioleur de casser une vitre. Pour ça, Aaron Schmitt gardait une vieille carabine Winchester qui appartenait à son [[Traditions|père]]. Elle était toujours utile quand [[Un besoin pressant|<span style="text-decoration: underline;">un besoin pressant</span>]] se faisait sentir en pleine nuit. Il suffisait d’ouvrir l’armoire contenant toutes les affaire d’Annie, de ressentir un immense vide à l’intérieur, et d’empoigner cette magnifique protection, ce fut la première chose que fit Aaron Schmitt en se levant ce soir-là.<br>La porte de la chambre s’ouvrit dans un grincement sordide. Aaron Schmitt jeta un coup d’œil à gauche, à droite, le couloir était désert. <br>La cuisine se trouvait au rez-de-chaussée. En descendant les vieux escaliers, le psychiatre se devait d’être prudent, une hanche cassée n’avait rien d’attirant, même s’il aurait voulu courir à toute vitesse comme lorsqu’il était enfant et qu’il avait des cheveux.<br>La cuisine avait perdue de sa beauté, la nourriture n’avait plus le même goût depuis qu’Annie n’était plus là. Aaron Schmitt resta un instant dans l’encadrement de la porte à se souvenir du tablier rouge, des casseroles à vapeurs et des tomates fraîches. Puis, il ouvrit une armoire, celle qui contenait du chocolat auparavant, et se servit un verre de bourbon, au diable le lait.<br>L’horloge au-dessus du lavabo indiquait trois heures du matin. Le clocher non loin de la maison confirma en sonnant trois fois. Dans quatre heures, Aaron Schmitt devra se rendre à son cabinet pour son rendez-vous avec [[Carnet de rendez-vous|Mme Heinz]], la grillée du cerveau maniaco-dépressive et paranoïaque. Il ne comprenait comment il était possible de se laisser aller à ce point-là. Depuis deux ans, Mme Heinz alignait scandales sur scandales. Elle soupçonnait tout le monde de faire partie d’un complot gouvernemental visant à l’abattre. Elle se baladait avec un revolver dans son sac et n’avait pas hésité à le sortir quand un jeune homme voulut l’aider à porter ses commissions.<br>Ah, Aaron Schmitt ne comprenait pas. En soixante ans de vie, il était las de ne pas comprendre.<br>Il pensa à [[Carnet de rendez-vous|Mme Magnin]], alcoolique depuis la mort de son père. Elle passait son temps à écumer son foie dans les bars. Il but une rasade brulante de son bourbon en hommage à elle, pauvre malade de la tête, siphonnée du cervelet.<br>L’horloge indiquait trois heures et quart. L’église non loin sonna une fois. Aaron Schmitt crut entendre un bruit dans le salon. Il empoigna sa carabine Winchester mais il n’y avait personne dans le salon. Il se servit un autre verre de bourbon.<br>La mallette trouvée cette après-midi était cachée sous le canapé en liège du salon et c’est dans cette direction que se portait le regard d’Aaron Schmitt.<br>Il n’en avait pas parlé à personne, surtout pas à cette ramonée du ciboulot de Mme Hagebutten, ni à [[Carnet de rendez-vous|M. Poe]] afin de lui demander si cette mallette lui appartenait. Il avait passé une bonne heure à compter tout l’argent. Cent mille francs. <br>Pris de panique, il avait couru dans son salon cacher la mallette sous le canapé, comme si elle était en sécurité là-dessous. C’était un réflexe nerveux.<br>L’argent, il n’en avait pas tant besoin. Ses honoraires étaient beaucoup trop élevés par rapport aux autres psychiatres de Bienne. Mais les patients continuaient d’affluer aux portes de son cabinet. <br>Mais depuis cet après-midi, une idée germait dans son esprit. Il avait quelques connaissances, des amis de l’Université de Zürich qui s’étaient spécialisés dans une autre branche de la médecine. Par exemple, le Dr Zimmermann de Fribourg le Dr Braum de Lucerne. Avec eux, il était sûr de bénéficier d’une certaine discrétion. Il ne savait pas combien pouvait coûter une opération. Enlever un peu de graisse au niveau du ventre, refaire le contour des yeux, retendre un peu la peau du visage, greffer des cheveux sur le crâne. Tout cela avait un prix conséquent, bien sûr. Le vieux psychiatre ne s’était plus regarder dans un miroir depuis dix ans désormais. Il s’était disputé avec Annie à ce sujet-là. Détacher tous les miroirs d’une maison, cela peut être mal interprété pour une femme.
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[[Category:Aaron_Schmitt|Aaron Schmitt]]
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[[Category:Aaron_Schmitt|Un coup]]

Aktuelle Version vom 21. Januar 2011, 09:20 Uhr


Il arriva au cabinet à huit heures, soit quinze minutes plus tôt que d’habitude, la mallette en main. Mme Hagebutten n’était pas encore là. Il entra dans son bureau, posa la mallette sur le sol et s’assit sur son fauteuil.
Aaron Schmitt avait prit la décision la plus simple, celle de remettre la mallette à Vito Antonielli et d’en informer M. Poe. De ce fait, les choses rentraient dans l’ordre et il ne parlerait plus jamais de cette mallette.
Il faut dire que la nuit avait été agitée. Le vieux psychiatre n’avait pas fermé l’œil. Il n’avait cessé de se demander comment Vito Antonielli avait su pour la mallette. Il n’y avait qu’une seule explication possible. M. Poe s’était souvenu l’avoir oubliée dans le cabinet d’Aaron Schmitt et l’avait dit à Vito Antonielli.
Le vieux psychiatre avait reçu un mail d’Antonielli, convenant d’un lieu et d’une heure de rendez-vous. Il devait le retrouver à neuf heures trente précises au café de l’Odéon. Mais il devait voir une patiente avant. Aaron Schmitt espérait que la séance ne s’éterniserait pas. Heureusement, la patiente annula le rendez-vous et le vieux psychiatre eut un peu moins d’une heure pour tenter de se calmer. Alors qu’il réfléchissait, tout en buvant un verre de scotch, Mme Hagebutten entra dans le bureau :
- Docteur Schmitt, je vous dérange ?
- Oui.
- C’est à propos de M. Poe, dit la réceptionniste presque en chuchotant, il est décédé hier soir.
Aaron Schmitt sentit son cœur faire un bond. Il se redressa sur sa chaise et faillit renverser son verre.
- Comment est-il mort ? demanda-t-il.
- Renversé par un camion.
Le vieux psychologue se rassit et étrangement, se sentait rassuré. Tout de suite, il avait imaginé M. Poe assassiné par Antonielli. Pendant un instant, il se demanda si tout cela s’était vraiment passé.
Sa montre indiquait neuf heures et quart. Il était temps de se rendre à l’Odéon. Une atmosphère grise et pluvieuse flottait dans les rues. Certains passants portaient des bonnets et d’autres des gants. L’Odéon ne se trouvait pas très loin du cabinet, à cinq minutes à peine. Arrivé sur place, Aaron Schmitt commanda une pression et il attendit.
Il scrutait les passants à travers la vitre, tout en buvant nerveusement. A plusieurs reprises, un homme entra dans le café et passa devant lui, mais sans s’arrêter. Il finit sa bière et en commanda une autre. Il ne pensa pas une seule seconde à M. Poe. Seul comptait l’instant présent. Une heure passa mais Aaron Schmitt était toujours autant nerveux. Il se demanda à quoi bon le faire attendre dans le café. Du pied, il vérifia que la mallette était là, sous la table. Un homme entra et le regarda, mais ce fut bref, et l’homme continua son chemin pour aller s’asseoir à une table du fond.
Il était midi et le café commençait à se remplir de clients qui désiraient manger. Aaron Schmitt paya l’addition et retourna en direction de son cabinet. Son esprit était embrouillé. Pourquoi Antonielli n’était pas venu ? Peut-être que celui-ci l’avait averti par mail. Aaron Schmitt sentait au fond de lui que quelque chose s’était passé. En arrivant au cabinet, la première chose qu’il fit fut de vérifier ses mails mais la boite était vide. Ensuite, il fouilla le bureau de Mme Hagebutten, celle-ci était partie manger, à la recherche d’une lettre ou d’un mot, de n’importe quoi. Il ne trouva rien. Alors, il décida de faire une pause et d’allumer un moment la télévision, celle qui se trouvait dans la salle d’attente. Il tomba sur le journal télévisé et à nouveau, son cœur fit un bond.
On y voyait Vito Antonielli embarqué dans une voiture de police. Apparemment, l’escroc s’était fait arrêter la veille. La présentatrice résumait en quelques mots l’arrestation et les chefs d’accusation. Voilà pourquoi Antonielli n’était pas venu à l’Odéon.
Aaron Schmitt éteignit le téléviseur. Etait-ce le fruit du hasard ? D’abord, M. Poe qui décède et ensuite Antonielli derrière les barreaux. Et le même jours, qui plus est.
Tout en buvant son verre de scotch, le vieux psychologue réfléchissait. Avec Antonielli en prison, il ne risquait plus rien. Mais que faire de tout cet argent ? La réponse était facile.
La nuit tombée, Aaron Schmitt se rendit au Lac de Bienne dont les reflets de lune éclaircissaient la nuit. Il resta un instant au bord de l’eau et observa les alentours. Personne à l’horizon. Alors, de toutes ces forces, il lança la mallette qui d’un bruit sourd, s’engouffra dans les profondeurs du lac.
Ensuite, il s’assit et s’alluma une cigarette. Il ne fumait plus depuis des années mais à ce moment, il avait besoin d’une cigarette. Puis, il se leva et rentra chez lui.
Il se mit au lit rassuré et heureux, se disant que parfois le hasard fait bien les choses. Il entendit un bruit provenant du couloir et se redressa dans son lit, à l’affût du moindre bruit. Il sortit gentiment du lit et dans l’obscurité la plus profonde, il se dirigea vers la porte d’entrée. Il lui semblait sentir la présence d’un homme dans le couloir. Il prit une bouffé d’air et d’un mouvement rapide, ouvrit la porte. Mais personne ne se trouvait derrière et le couloir était vide. Alors, il s’appuya contre le mur, s’alluma une cigarette et se demanda si tout cela s’était vraiment passé. Puis, il ressentit une grande douleur.